S'inscrire à notre newsletter

La grande démission

Publié en octobre 2022
Président de l'Institut Diderot, fondateur, président du groupe d’édition Humensis et président d’honneur du groupe Covéa qui réunit les mutuelles d’assurance MAAF, MMA, GMF et PartnerRe.

Depuis quelques mois un nouveau thème s’est imposé à l’attention du public : le mouvement de désengagement des salariés à l’égard de l’emploi. La démission sans raison claire, l’absence d’engagement dans le travail, la volonté de s’éloigner de l’entreprise que traduit le désir de télétravail, les difficultés de recrutement, les reconversions improbables, la croissance de l’absentéisme et autres manifestations tétanisent les entreprises et sidèrent les observateurs habituels du marché du travail.

En fait, on feint d’ignorer que chaque fois qu’il peut s’exprimer sans conséquences préjudiciables, le refus du travail apparaît. Alors que le fait d’être actif est une source de satisfaction universelle, la contrainte que représente le travail est rejetée. Dans l’histoire, ceux qui ont pu éviter de travailler en ont profité. La noblesse de l’ancien régime s’en était même fait une règle et, plus près de nous, on peut lire dans des rapports de la Cour des Comptes, qu’il existe des fonctionnaires payés sans affectation, des services qui se sont organisés pour que chacun puisse prendre des jours de congé maladie non justifiés, etc… Parallèlement, moins d’un salarié sur dix adhère désormais à un syndicat.

L’attention nouvelle consacrée au problème tient à la fois à un changement de dimension et à une modification de l’attitude de la société à son égard. Les comportements d’évitement du travail bénéficiaient traditionnellement de la complaisance complice de certains et suscitaient une gêne coupable chez les autres. Désormais, tous les tabous sont levés et plus rien ne freine son évocation.

Ce mouvement de désengagement et le regard qu’on porte sur lui sont-ils indépendants de tout autre phénomène social ?

À chaque élection on constate le désengagement du politique par le nombre croissant d’abstentionnistes, le manque de candidats à l’élection dans certaines petites communes ou l’absence évidente de convictions de tant de candidats dans les batailles pour les postes les plus prestigieux. Est-ce un phénomène autonome ?

Par ailleurs, on constate un moindre engagement dans la vie de famille. La durée de vie commune des couples mariés raccourcit et le nombre d’enfants se réduit. Dans tous les pays développés le taux de fécondité est tombé en dessous du seuil de 2,1 % nécessaire à la stabilité démographique d’une collectivité.

Que tant de désengagements simultanés des formes traditionnelles de la vie sociale n’aient pas de causes communes semble peu probable. Les structures sociales se créent et évoluent en fonction des nécessités vitales, en prenant en compte la culture, en particulier la science, qui permet d’alléger les contraintes de la nécessité et les religions qui tendent à sacraliser les réponses sociales du passé. Globalement l’espèce humaine s’en est plutôt bien tiré, trop bien peut-être pour le reste de la planète et son propre avenir.

Dans cette perspective, les différentes formes de désengagement que l’on constate, apparaissent comme des tentatives encore inconscientes de leur convergence de faire apparaître des structures et valeurs nouvelles répondant encore de manière satisfaisante aux nécessités vitales d’aujourd’hui, tout en réduisant les excès qui en menacent la pérennité. La société aspire à moins de population pour ne pas avoir à se battre pour le partage des ressources, à moins de contraintes sociales dans le choix des activités de ses membres et à plus de liberté dans celui de communautés d’attachement traditionnelles ou nouvelles, réelles ou virtuelles.

L’évolution des structures sociales est lente. La différence de rythme au sein des sociétés est toujours source de conflits entre les « modernes » qui méprisent les « attardés » et ces deniers qui se considèrent comme « modernes » face à des « décadents ».

4

Vous pourriez aussi être intéressés par

04 2023

La retraite en perspective

La réforme des retraites voulue par le gouvernement se heurte à un refus assez général de la société française. Elle est techniquement nécessaire, mais, sans […]

Lire la suite
La fin du travail ? 04 2022

La fin du travail ?

Le développement du numérique en général, de l’intelligence artificielle en particulier, fait craindre à certains l’avènement d’un chômage généralisé. Beaucoup d’innovations apparues depuis le début […]

Lire la suite
Le blog de Jean-Claude Seys 07 2020

Un nouveau rapport au travail

Le déconfinement a mis en évidence un phénomène que la société sous-estime ou feint d’ignorer : le rejet du travail par une partie de la population. […]

Lire la suite
Le blog de Jean-Claude Seys 06 2020

Le travail de demain

La crise du coronavirus a fortement impacté le travail et le contrat de travail, ce qui devrait, comme le font souvent les crises, renforcer certaines […]

Lire la suite
Le blog de Jean-Claude Seys 05 2020

Un monde enchanté ?

Le terme de pandémie désigne la propagation rapide d’une maladie infectieuse dans une zone géographique s‘étendant à de nombreux pays. C’est le cas du Covid-19. […]

Lire la suite

Suivez-nous sur Twitter

|PRESSE|
✅«Le Pape, quelle majorité?»
✅Dans @Challenges, l’éditorial de André #ComteSponville.
✅Qu’il faille secourir
les naufragés, c’est une évidence, à la fois morale et juridique. Mais qui ne saurait tenir lieu d’une politique – si possible européenne – de l’immigration.

🔜|DÉBAT|
✅«Le #MoyenOrient en 2050».
✅Jean-Pierre Filiu, Professeur à @sciencespo. Dernier ouvrage paru «Stupéfiant Moyen-Orient. Une histoire de drogue, de pouvoir et de société» (@EditionsduSeuil, 2023).
🔴Live à suivre, ici-même, mercredi 11 octobre à 8⃣:3⃣0⃣

🆕|BLOG|🆕
✅Le billet d'humeur de Jean-Claude Seys✒️
✅ Lutte contre «l'artificialisation des sols» en 🇫🇷
✅ La Loi du 20 juillet 2023 ne tient pas compte de l'explosion démographique des villes🚨
via @InstitutDiderot

Image for twitter card

l'artificialisation des sols - Institut Diderot

Des dispositions ont été arrêtées par l’État pour mettre un terme à l’artificialisation des sols. Dans les ...

www.institutdiderot.fr

|PRESSE|
✅La gestion de l'#abaya, un piège pour l'#ÉcoleRépublicaine.
✅Face à ce débat, André #ComteSponville ne parvient ni à se réjouir de son interdiction ni à la dénoncer et fait plutôt un constat d'échec...
via @Challenges

Image for twitter card

La gestion de l'abaya, un piège pour l'école républicaine - Challenges

Face au débat de l'abaya à l'école, notre éditorialiste fait un constat d'échec: "L'islam politique est devenu ...

www.challenges.fr

|🔴LIVE|
✅Conférence de rentrée.
✅La droite en France : État des lieux et avenir.
✅@davidlisnard, maire de la @villecannes, Président de l’@l_amf, Président de @Nouv_Energie.

🎧|PODCAST|🎧
✅«L’homme politique face aux diktats de la com».
✅Pour l'@InstitutDiderot, l'analyse de @francoisbelley.
✅«Le problème du conseiller en (coups de) com, c’est qu’on devrait d’abord le payer pour dire ce qui ne va pas».
✅À ÉCOUTER ICI👇

Si vous préférez être séduits, ne vous étonnez pas d’être trompés !

À découvrir ici en podcast👇
« L’homme politique face aux diktats de la com » :
ma dernière publication préfacée par le philosophe André Comte-Sponville.


#Macron20h #Senatoriales2023

|PRESSE|
✅ «#Google, un monopole économique et intellectuel»🧠
✅ Un moteur de recherche n’est pas idéologiquement neutre⚠️
✅ Ne laissons pas Google, ou ses concurrents, penser à notre place❗️
✅ Dans @Challenges, l’éditorial de André #ComteSponville.

[Interview #compol] « Le conseiller en (coups de) com politique devrait être payé pour avoir des idées fortes et surtout dire ce qui ne va pas » selon @francoisbelley, auteur d'une note intitulée "L'homme politique face aux diktats de la com".

Charger plus de Tweets