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Guerre ou pas ?

Publié en février 2015
Président de l'Institut Diderot, fondateur, président du groupe d’édition Humensis et président d’honneur du groupe Covéa qui réunit les mutuelles d’assurance MAAF, MMA, GMF et PartnerRe.

L’attentat de Copenhague a fourni aux hommes politiques une occasion de renforcer leur image en renouvelant leur « déclaration de guerre au terrorisme ». La guerre étant la pire des choses, qualifier ainsi ce qui arrive vise à traduire la gravité de la situation et à suggérer l’ampleur de la mobilisation en vue de la riposte.

Il n’est pas certain cependant que l’emploi de ce terme soit judicieux. Il n’y a pas de doute sur sa pertinence en Syrie où une coalition d’États affronte avec toutes les ressources de la guerre une entité qui prétend à un statut étatique.

La situation créée par le terrorisme dans divers pays, dont le nôtre, est toutefois différente. En cherchant, par le mot « guerre », à gonfler le péril et à mobiliser, on laisse entendre que la situation est maîtrisable. Car toute guerre a une fin : les combats s’arrêtent quand un des adversaires a épuisé ses ressources et un armistice ou un traité de paix est alors signé. Rousseau l’a dit clairement : « chaque État ne peut avoir pour ennemi que d’autres États et non pas des hommes, attendu qu’entre choses de diverses natures on ne peut fixer aucun vrai rapport. »[1]

Rien de tout cela ne caractérise le terrorisme qui oppose, le plus souvent, des États à certains de leurs ressortissants. Ceux-ci ne respectent aucune loi de la guerre et leur défaite, en général la perte de leur vie, ne peut conduire à aucun traité avec qui que ce soit. Si nous sommes en guerre sur notre propre territoire, quel est l’envahisseur ? Quant à la mobilisation des moyens, de quoi parle-t-on ? L’agression à l’arme blanche de trois soldats devant un centre communautaire juif à Nice a mis en évidence le caractère inopérant de ce type de défense face à des terroristes que rien ne distingue du reste de la population. Les patrouilles militaires dans des lieux sensibles, comme les gares, rassurent les vieilles dames mais ne servent à rien d’autre. C’est à peine si ces patrouilles peuvent se défendre quand elles sont attaquées en raison du risque de provoquer elles-mêmes une hécatombe parmi les passants.

Les victimes du terrorisme peuvent être nombreuses, comme on l’a vu aux États-Unis en 2001. Elles pourraient l’être plus encore avec des armes de destruction massive, notamment bactériologiques. Après avoir été l’une des causes de la guerre en Irak, ce risque a disparu des radars médiatiques, mais ne peut pour autant être écarté définitivement. Il n’est pas difficile d’imaginer ce qui adviendrait si de telles armes tombaient dans de si mauvaises mains.

À ce jour, cependant, le nombre de victimes du terrorisme n’a rien à voir avec les pertes humaines d’un conflit moderne.

Si le terrorisme n’est pas la guerre, on ne peut pas espérer y mettre fin comme à une guerre. Celles-ci sont gagnées par les plus riches et le monde développé n’aurait pas à s’inquiéter. Mais les guérillas terroristes n’ont besoin que de ressources humaines par essence renouvelables et l’absence de biens à détruire en même temps que leur mépris de la vie rendent inutiles les armes des puissants.

[1] Du contract social, Livre I, chapitre 4, « De l’esclavage », in Œuvres complètes, vol. III, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », p. 357.

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