S'inscrire à notre newsletter

La Nationalité, l’acquérir et la perdre

Publié en février 2016
Président de l'Institut Diderot, fondateur, président du groupe d’édition Humensis et président d’honneur du groupe Covéa qui réunit les mutuelles d’assurance MAAF, MMA, GMF et PartnerRe.

nationalité3Dans un monde de plus en plus complexe, chaque problème posé a des implications de plus en plus nombreuses et d’ordre différent. La recherche d’une solution s’en trouve plus délicate et difficile que par le passé. Elle se révèle impossible sans un travail d’analyse et de réflexion.

Le paradoxe c’est que, face à cette complexité croissante, la sphère médiatico-politique développe au contraire une approche de plus en plus simpliste, quand elle n’est pas incohérente. Elle obéit à la logique du Sapeur Camember qui, pour se débarrasser d’un tas de terre, creuse un trou pour l’y mettre. La production médiatique et politique, toujours habitée par le souci de l’urgence, ne considère dans un problème que sa cause immédiate. Le temps de l’analyse et de la réflexion est largement dépassé.

L’actualité, en France, s’est focalisée récemment sur la déchéance de nationalité. L’opinion publique, à hauteur de 85%, y semble largement favorable lorsque sont visés les binationaux coupables d’actes de terrorisme.

Favorables ou hostiles à cette mesure, rares sont ceux qui signalent qu’en touchant à la nationalité sans en avoir « revisité » l’acquisition ne permettra guère de conserver une cohérence d’ensemble. Comment, en effet, peut-on parler de déchéance sans évoquer préalablement l’acquisition ?

Dans l’histoire, droit du sol et droit du sang ont été utilisés en fonction des intérêts du moment. Les pays d’immigration ont naturellement privilégié le droit du sol. La France elle-même a rétabli le droit du sol dans la seconde partie du 19ème siècle. L’objectif était de mobiliser plus largement possible dans le cadre d’un éventuel conflit. Les pays d’émigration, quant à eux, préfèrent le droit du sang qui leur permet de garder un lien avec leur diaspora.

La coexistence des deux systèmes crée évidemment le problème de la double nationalité dont le principe est considéré comme une valeur quasiment sacrée de la République.

Quand l’opinion publique répond favorablement à l’idée d’une déchéance pour fait de terrorisme, n’oublions pas que la réponse dépend en grande partie de la qualité et de la précision de la question. Et ici la cohérence manque…

Le fait de naître sur le sol français accidentellement ou par calcul, peut-il justifier l’acquisition systématique et définitive des droits de la nationalité ? Quid, par exemple, si le pays du double national entre en conflit avec la France dans une situation de guerre ? Le ministère des Affaires étrangères répond que « les doubles nationaux sont soumis aux obligations du service national à l’égard des deux Etats dont ils possèdent la nationalité ». Mais, en cas de conflit, l’Etat peut priver tout citoyen de la nationalité française s’il sert une armée étrangère. Ce dernier peut-il alors faire valoir une objection de conscience ? Du moins pourrait-on leur permettre d’exprimer un choix au moment où ils atteignent de leur majorité, comme jusqu’en  1998.

Se voir imposer une nationalité n’est pas plus démocratique que l’inverse. Quid alors de l’égalité ? L’égalité posée comme principe en faveur des binationaux, n’exclut pas des inégalités en défaveur des mono-nationaux. Certains délinquants ayant la double nationalité sont assurés, pour peu qu’ils quittent le territoire au nez et à la barbe de la police, d’être accueillis tranquillement dans leur seconde patrie.

La nationalité est sans aucun doute un problème qui mérite réflexion. Les règles contradictoires ne devraient pas pénaliser certains citoyens en leur imposant des conflits de devoirs, ni rendre la vie trop facile aux malins…

Cette réflexion devrait constituer un préalable à toute décision considérée comme assez importante pour être introduite dans la Constitution.

0

Vous pourriez aussi être intéressés par

Sur le changement 05 2021

Sur le changement

Dans les sociétés modernes, le changement est devenu une valeur en soi et un synonyme de progrès, aussi la résistance au changement est-elle considérée comme […]

Lire la suite
Le blog de Jean-Claude Seys 02 2021

Le chaos

Les commentaires sur l’actualité donnent l’impression que le monde vit dans le chaos et qu’il s’agit là de la conséquence de l’incompétence des gouvernants. En […]

Lire la suite
Le blog de Jean-Claude Seys 12 2020

Retour à la normale

Tout le monde attend avec impatience la fin de la pandémie et le retour à une situation comparable à l’avant crise. Il est évident que […]

Lire la suite
Le blog de Jean-Claude Seys 10 2020

Être où ne pas être

La crise sanitaire, due au coronavirus, a provoqué une accélération du travail à distance. Mais cette évolution était déjà en cours et s’inscrivait dans un […]

Lire la suite
Le blog de Jean-Claude Seys 10 2020

Tous coupables ?

Une habitude se répand dans la société française consistant à condamner les « incivilités », pour reprendre l’expression désormais consacrée, tout en évitant d’en désigner les responsables. […]

Lire la suite

Suivez-nous sur Twitter

|PRESSE|
✅La #prospective ne s'use que si on ne s'en sert pas.
✅ Dans @LesEchos, l’éditorial de @cyberguerre
✅Les travaux de prospective n'ont jamais été autant disponibles. Mais sans réel impact sur les décisions politiques, regrette Nicolas Arpagian.

Image for twitter card

La prospective ne s'use que si on ne s'en sert pas

Conjoncture, nouvelles menaces, innovations technologiques… les travaux de prospective n'ont jamais été autant disponibl...

www.lesechos.fr

|PUBLICATION|🆕
✅#Lavenirduféminisme ♀️
✅En avant-première de la publication de son prochain ouvrage, @CarolineFourest nous fait l’amitié de répondre à nos questions et dresse, pour l’@InstitutDiderot , un état des lieux du #féminisme contemporain🔽
via

L'avenir du féminisme

Les combats féministes du siècle dernier, foncièrement universalistes et laïques, avaient pour objectif l’émancipatio...

issuu.com

|#Mémoire|
✅ En ce #8mai2023, nous célébrons les 78 ans de la capitulation du régime nazi, le #8mai1945 (le 9 mai en Russie), et nous pensons à toutes celles et ceux qui se sont battus pour la Liberté🇫🇷
✅ Bon #8Mai à tous !

|BLOG|
✅ Le billet d'humeur de Jean-Claude Seys
✅#Diversité & #Démocratie.
✅ Il est de plus en plus difficile, dans notre pays, d’obtenir le consensus d’une majorité de citoyens sur une orientation politique quelle qu’elle soit.
via @InstitutDiderot

Image for twitter card

Diversité et démocratie - Institut Diderot

Il est de plus en plus difficile, dans notre pays, d‘obtenir le consensus d‘une majorité de citoyens ...

www.institutdiderot.fr

|PRESSE|
✅ Quel est le rôle d’un chef d’#entreprise❓
✅ Dans @Challenges, l’éditorial d'#AndréComteSponville.
✅ Ce n’est pas la comptabilité ou l’arithmétique qui fait les bons patrons. La psychologie importe autant ou davantage.
✔️#entreprise
✔️#patronat

|PUBLICATION|🆕
✅Les échecs de la #vulgarisationscientifique🧠
✅La #science en otage de la #postvérité & de la #désinformation⚠️
✅Les exemples ne manquent pas : #nucléaire #climat #vaccin #OGM #5G…
✅Pour @InstitutDiderot, l’analyse de @EtienneKlein.

Petit plaidoyer matutinal pour l’organisation d’assises nationales de la diffusion de la culture scientifique.

Petit plaidoyer matutinal pour l’organisation d’assises nationales de la diffusion de la culture scientifique.

Étienne Klein : "La connaissance est une affaire publique. Mais la vulgarisation ne fonctionne qu'auprès de ceux auprès de qui elle fonctionne, c'est un truisme. Alors, la vulgarisation n'est plus seulement un projet culturel, mais politique." #le7930inter

Charger plus de Tweets