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Gilets jaunes et représentativité

Publié en janvier 2019
Président de l'Institut Diderot, fondateur, président du groupe d’édition Humensis et président d’honneur du groupe Covéa qui réunit les mutuelles d’assurance MAAF, MMA, GMF et PartnerRe.

L’opinion publique française semble considérer, à une  très large majorité, que ses élus ne la représentent plus fidèlement.

On peut postuler que ceux d’aujourd’hui ne sont pas moins compétents que ceux d’hier ni plus mal intentionnés.

Alors, qu’est-ce qui a changé ?

Beaucoup de choses ! Et tout d’abord une réduction du rôle des élus au profit de l’exécutif, lui-même capté par une technocratie non élue. C’est la perte de pouvoir et non de leur représentativité qui explique, dans une large mesure, le sentiment qu’ils ne défendent plus l’intérêt des électeurs.

En second lieu, l’émergence d’une force politique nouvelle qu’on salue comme une manifestation de la vie démocratique mais qui en est souvent la négation : une multitude d’associations focalisées sur un seul objectif le défendent au détriment de tous les équilibres que des élus doivent rechercher.

L’exemple de la limitation de vitesse à 80 km heure, qui a joué un rôle non négligeable dans la révolte des gilets jaunes, est illustratif : en plein mouvement de contestation, des spécialistes de la sécurité routière ont d’ailleurs déclaré qu’il fallait tenir bon et maintenir cette mesure, dont l’utilité n’est au demeurant pas avérée, mais là n’est pas le problème.

Le rôle des élus est de mettre en œuvre la volonté du peuple, alors que beaucoup de groupes  de pression, qui se prétendent démocratiques, veulent imposer, à travers l’exécutif, leur vision du monde. En matière de tabac par exemple, autant il est légitime que l’État interdise aux fumeurs de mettre en danger la vie d’autrui et les alertent sur les dangers du tabac pour eux-mêmes, autant l’interdiction de fait par le prix est une limite à la liberté.

Ainsi, beaucoup de groupes de pression prétendent sauver les hommes au prix de leur liberté, tout comme les Savonarole de l’histoire ont sacrifié des vies pour sauver des âmes.

La revendication pour plus de démocratie directe vise à permettre de mesurer l’importance que la société, à tort ou à raison, accorde à une problématique et il est impossible de se déclarer démocrate tout en considérant que ce n’est pas au peuple de décider ce qui est important à ses yeux.

Certains travers supposés du système représentatif tiennent aussi aux limites de la démocratie elle-même dans certaines circonstances.

Ainsi, la population est devenue très hétérogène : la dispersion des opinions qui en résulte donne le pouvoir à un parti ou un homme qui ne recueille bien souvent que le quart des suffrages : nul étonnement à ce que les trois quarts restants ne se sentent pas représentés ! Pire, la minorité qui a permis au vainqueur de l’emporter a fréquemment voté par défaut, contre les concurrents considérés comme pires et ne se sentent pas davantage véritablement représentés.

Par ailleurs, certains ont voté en fonction de la position du candidat sur un thème jugé principal au jour de l’élection – la fiscalité ou l’immigration par exemple – sans que ceci implique l’adhésion aux positions du candidat sur d’autres problèmes.

Enfin, dans une société marquée par des oppositions irréductibles, la majorité ne veut rien dire. Le principe majoritaire a un sens dans une société homogène dans laquelle les oppositions ne sont pas frontales ; dans le cas contraire, une décision qui choque une minorité est ressentie de manière identique qu’elle soit prise par une majorité élue par 51 % de la population ou par un dictateur ainsi qu’on peut le voir dans des pays où existent des oppositions religieuses violentes.

Pour ces différentes raisons, il devient progressivement plus difficile de faire fonctionner la démocratie au moment même où le régime cesse d’être fidèle aux principes qui le protégeraient quelque peu.

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