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Faut il condamner le porteur de mauvaises nouvelles?

Publié en décembre 2011
Président de l'Institut Diderot, fondateur, président du groupe d’édition Humensis et président d’honneur du groupe Covéa qui réunit les mutuelles d’assurance MAAF, MMA, GMF et PartnerRe.

Les agences de notation n’ont pas bonne presse. On leur prête une importante responsabilité dans le désordre des marchés financiers.

Certes, l’abaissement de la note d’un emprunteur a pour celui-ci des conséquences fâcheuses : il devra emprunter à un taux plus élevé, et s’il ne le peut pas, la catastrophe est proche.

Du coup, de bonnes âmes condamnent l’existence des agences de notation ou suggèrent qu’elles deviennent publiques. Quelles en seraient les conséquences ?

Aucun prêteur n’est obligé de faire confiance à la notation (encore que les régulateurs imposent aux banques et sociétés d’assurance la prise en compte de ces notations pour choisir leurs investissements). Un prêteur peut procéder lui-même à des études. C’est ce que font les banquiers avant d’accorder un crédit à une entreprise. Mais cela serait monstrueusement coûteux puisque chaque investisseur devrait disposer des compétences d’une agence de notation, et effectuer ses diligences sans en partager les coûts.

Le recours aux agences de notation est donc une facilité pour les investisseurs qui ne peuvent reprocher aux agences dont ils utilisent gratuitement les services de faire moins bien qu’ils feraient. En effet, les agences peuvent dire  (et disent en effet, même si elles sont parfois coupables de laisser entendre que leur pouvoir va au-delà) : la situation d’un émetteur, aujourd’hui, est telle que sa probabilité de défaillance, à court et à moyen terme, est statistiquement de tel ou tel niveau.

Comme le montre l’actualité, le management même des entreprises ne voit pas toujours le mur contre lequel il précipite sa maison. Les banquiers qui étudient eux-mêmes le risque d’un emprunteur se trompent de temps à autre, et les experts – nombreux et qualifiés – de la Commission européenne ont été bernés par la Grèce.

Il ne faut donc pas demander à des observateurs extérieurs d’être infaillibles ni leur reprocher de faire évoluer leur jugement au fur et à mesure que la situation de l’emprunteur elle-même évolue.

L’idée d’une agence publique, avancée par un commissaire européen, est donc source de perplexité. Serait-ce une agence qui ne signalerait pas l’apparition de signes inquiétants dans la situation d’un emprunteur, correspondant soit à une dégradation réelle soit à une meilleure connaissance de sa situation ?

Dans l’affirmative, cela aurait-il signifié qu’il fallait continuer à encourager à prêter à la Grèce au-delà de ce qui était déjà excessif en regard de ses capacités de remboursement, et ceci avec l’effet de lui enlever tout besoin de faire des efforts d’économie douloureux ?

Ou bien encore, est-ce que seuls certains prêteurs auraient dû être informés, pour atténuer le choc ? Mais que devient alors de l’obligation de transparence au cœur des recommandations des autorités européennes ?

Une vraie critique peut être adressée aux agences de notation : elles sont payées par les émetteurs qui les utilisent pour le marketing de leur dette et elles peuvent, à tort ou à raison, être soupçonnées d’être partiales. Il faut ne pas perdre de vue que, pour certains émetteurs, le recours au marché financier, qui se contente d’informations superficielles, est un moyen d’échapper à la perspicacité du banquier, ce qui, somme toute, est peu rassurant.

Pour éviter cet inconvénient, il conviendrait que ce soient les prêteurs qui, collectivement, les rémunèrent ce qui n’améliorerait pas nécessairement les choses au fond, mais supprimerait au moins, des sources légitimes de soupçon.

Article paru dans Courtage News de décembre 2011.

Commentaire additionnel :

Les agences de notation ne sont pas d’une grande habileté en matière de communication et semblent vouloir remonter tout le monde contre elles, alors que leur position de fond est plutôt solide.

On entend des hommes politiques ou des journalistes affirmer qu’il faudrait « interdire aux agences de notation de communiquer. » C’est extraordinaire, dans la mesure où personne n’admettrait qu’on puisse interdire à un journaliste ou un politique, pas plus d’ailleurs qu’à un simple quidam, de dire que, selon lui, tel pays ou telle entreprise va à la faillite. Les agences de notation, qui ont étudié les comptes avec attention, qui font peut-être des erreurs d’appréciation, mais probablement moins que ceux qui ne les ont pas regardés, ne devraient pas faire part de leur conviction, alors même qu’elles procèdent avec infiniment plus de nuances ? Avant d’annoncer qu’une entreprise ou un État risque d’être défaillant, elles procèdent par paliers allant de 3 A à D (pour Standard & Poor’s), eux-mêmes précisés par des plus et des moins. Au total, et sans compter les nuances apportées par des avertissements concernant la possibilité de changements futurs, il y a plus de 20 niveaux. Cette progressivité n’est pas comprise par le public qui admet qu’il y a des emprunteurs sûrs et d’autres qui ne le sont pas, mais ne comprend pas qu’on puisse dégrader une institution de 3 à 2 A sans que cela signifie un risque de faillite !

La proposition d’un commissaire européen d’interdire la publication d’une notation quand elle devient mauvaise équivaudrait à échanger les nombreux paliers qui balisent la dégradation d’une situation par un seul, le pire.  Si la publication de toute notation en dessous de A était interdite, il est évident que tout investisseur normalement constitué, sachant qu’aucune information nouvelle ne lui sera donnée dans l’avenir, assimilerait l’arrêt de la notation à la plus mauvaise, avec des conséquences plus graves que le franchissement d’un cran sur 20.

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